Une prise de conscience

Une prise de conscience

Parcours des enjeux écologiques #6/8 : Pour que la Terre reste un monde vivable pour les générations futures.

La Terre en état d'alerte climatique

En octobre 2023, une équipe internationale de chercheurs a alerté sur l'état critique de la Terre, mettant en lumière la contradiction entre la prospérité matérielle et la détérioration écologique.

Le rapport de BioScience résume une situation menaçante : la planète Terre est confrontée à une crise climatique sans précédent, marquée par des conditions météorologiques extrêmes et des records climatiques battus à un rythme alarmant. Les activités humaines émettant des gaz à effet de serre ont conduit à des températures mondiales records, des océans historiquement chauds, une fonte des glaces sans précédent et des vagues de chaleur extrêmes. Les scientifiques soulignent que ces événements sont les signes d'une instabilité dangereuse ; ils ont identifié pas moins de 35 « signaux vitaux planétaires », parmi lesquels 20 atteignent aujourd’hui des niveaux records.

Le rapport présente des données sur les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d'énergie, la perte de couverture arborée mondiale, les effets sur les océans et les glaciers, ainsi que les impacts sur la vie marine et les écosystèmes. Malgré certains progrès minimes dans la réduction de la déforestation et de l'augmentation de l'utilisation d'énergies renouvelables, les émissions de carbone continuent d'augmenter, les combustibles fossiles restant dominants dans le mix énergétique mondial.

Le rapport met en évidence l'urgence d'une action immédiate pour lutter contre le changement climatique, soulignant que la situation actuelle représente une menace existentielle pour l'humanité. Les scientifiques appellent à une prise de conscience et à des actions politiques décisives pour atténuer les effets du changement climatique et protéger la planète pour les générations futures.


Passer d’une société performante à une société robuste

Pour répondre aux besoins en partie imaginaires du citadin occidental du 20e siècle, l'adaptation de la Terre a été optimisée à l'extrême. Et de nouvelles propositions émergent chaque jour pour un mode de vie toujours plus déconnecté de la nature, avec une surenchère de nouveaux besoins, alimentée par des outils connectés à Internet de plus en plus exigeants en ressources. L'adaptation de la Terre à l'Homo numericus s'amplifie avec une foi inébranlable au détriment des écosystèmes. De plus, les efforts entrepris contre le réchauffement climatique et la pollution sont parfois détournés pour justifier une production accrue de nouvelles machines censées résoudre tous ces problèmes. Apathiques, nous assistons à une compétition entre différentes formes de capitalisme, alors qu'il serait urgent de tourner le dos à ce modèle de croissance socio-économique basé sur la performance.

Pour envisager notre futur dans un monde fluctuant, le biologiste de formation Olivier Hamant propose de sortir du culte de la performance en s’inspirant des principes de la nature et du vivant : la coopération, la circularité et la robustesse. Il propose donc la robustesse comme réponse opérationnelle aux turbulences sociales, financières, sanitaires, écologiques, énergétiques ou géopolitiques.

Passer d’une société performante à une société robuste, c’est certes « une révolution copernicienne ». Mais construire un nouveau modèle socio-économique, c’est aussi, nous dit Olivier Hamant, « une voie ouverte et stimulante qui démine l’éco-anxiété grandissante face aux constats qui peuvent écraser, et aux limites du développement durable ou de la sobriété. Un engagement communicatif à transmettre. »

L'injonction de sobriété, complète Olivier Hamant, n'est pas opérationnelle quand elle s'adresse sans discernement à une population qui n'a rien plutôt qu'à une population riche et privilégiée, "(...) mais si on commence par la robustesse et à techno-diversifier, on va devenir sobre, presque sans s'en rendre compte."

Olivier Hamant démontre l'importance et la manière d'appliquer le concept de robustesse dans différents secteurs tels que l'agriculture, l'économie circulaire, l'innovation, le travail et l'organisation, entre autres. Il ne s’agirait pas de renoncer à l’efficience ou à la sobriété, mais de ne les mettre en œuvre que dans le cadre de solutions robustes.

La robustesse se construit sur de la circularité, de la réutilisation matérielle, mais aussi sur la richesse des interactions et de la collaboration pour résoudre les problèmes. Faire de la robustesse, c’est sortir de la pensée réductionniste « qui valorise l’appauvrissement des interactions » pour aller vers la pensée systémique « qui se construit au contraire sur l’abondance des interactions. » 

Il s'agit désormais de renier le credo de la performance, "et de réinsérer la technosphère dans le cycle du vivant." Olivier Hamant

On vous recommande la lecture de "Antidote au culte de la performance. La robustesse du vivant".
‘Nous sommes dans une secte de la performance’ déplore le biologiste français Olivier Hamant
Le biologiste français Olivier Hamant, directeur de l’institut Michel Serres à Lyon, était de passage en Belgique pour…

« Consommer moins, répartir mieux »

Une transition vers la post-croissance pour reprendre le contrôle de nos systèmes économiques.

La popularisation du PIB, adopté lors de la conférence de Bretton Woods en 1944, a conduit à une quête incessante de croissance matérielle, aboutissant à une accumulation excessive de biens au détriment de l'environnement. Dans ce contexte, Eloi Laurent propose de redéfinir la richesse en termes de santé et de coopération sociale plutôt que de croissance monétaire infinie. Il s'oppose à l'idée de "croissance verte".

Eloi Laurent (économiste à Stanford) : « Sortons la croissance de nos imaginaires »
INTERVIEW// Eloi Laurent travaille dans deux universités de rang mondial : Stanford et Sciences Po Paris où il officie comme économiste senior à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Il l’assure, les deux institutions sont engagées dans une révolution qui vise à élaborer « un modèle économique où la croissance n’est plus l’alpha et l’oméga ». Il publie aux éditions de La Découverte l’essai « Economie pour le XXIe siècle » dans lequel il trace des voies vers la post-croissance.

Éloi Laurent est l'auteur d'un manuel pour révolutionner l'Économie pour le XXIe siècle - Manuel des transitions justes

C’est pas du vent - Un manuel des transitions justes, signé Eloi Laurent
Nous, les humains, ne représentons que 0,01% de la masse de tous les êtres vivants, mais nous avons réussi à altérer 75% de la surface de la planète et à faire disparaître 80% des mammifères sauvages…

Biosphère à préserver / justice sociale (biophysique et éthique) - La clé : la justice

« La transition doit être juste. Il faut articuler la question écologique à la question sociale. Pendant 40 ans, on a vécu une hallucination collective qui s'appelle le néolibéralisme. » Éloi Laurent

Le texte suivant "Entreprendre sans détruire, c’est possible" d'Emmanuel Druon est à télécharger :


La technique devait libérer, elle asservit
Gorz et la technique : elle devait libérer, elle asservit
TRIBUNE. Pour le philosophe, qui fut journaliste à « l’Obs », les techniques productivistes ne sont pas neutres et conduisent à une perte de sens, comme le rappellent ici l’économiste Christophe Fourel et la chercheuse en philosophie Clara Ruault
« Jacques Ellul a vu avant les autres que le développement technique ruine l’homme intérieur. Il a été sensible à la porosité entre la technique et l’homme privé, au caractère anthropophage de la technique. »
Jacques Ellul, penseur du XXIe siècle
Sociologue et théologien, critique de la société technicienne, Jacques Ellul aurait eu 100 ans cette année. Discrète mais active, son œuvre continue de questionner et d’agir.

Une remise en question profonde

Malgré les obstacles, la véritable libération requiert un changement non seulement dans les structures tangibles de la société, mais aussi dans les idées, les croyances et les perspectives qui les sous-tendent. Cela implique une remise en question profonde des représentations et des modes de perception afin d'évoluer vers des alternatives plus équilibrées et durables.

Pour le dire avec les mots de l'historienne Barbara Duden : « Il (Ivan Illich) avait compris que ce n’est pas tant des techniques et des institutions qu’il faut nous libérer, mais des représentations et des modes de perception qu’elles génèrent ».

La transition écologique n'envisage pas de telles orientations politiques et sociétales. Et pour cause, le pays qui initierait des changements allant vers la décroissance deviendrait la cible immédiate des marchés financiers, surtout s'il est fortement endetté avec des capitaux étrangers. Les gens restent souvent figés dans le statu quo, sans remise en question fondamentale des individus et des institutions qui les dirigent, avec un référentiel commun disloqué.

Pourtant, on attendrait des responsables politiques qu'ils rétablissent le contrôle sur l'avenir, au-delà des égoïsmes nationaux. Quant aux scientifiques et aux ingénieurs, on attendrait d'eux qu'ils reprennent le contrôle sur d'autres pratiques, en cherchant à travailler avec les processus naturels plutôt qu'à les remplacer.

La construction d'imaginaires partagés et leur persistance sur plusieurs générations sont également essentielles pour réaliser un futur positif dans notre société.

Cyrano s'élève dans la Lune, Jules Verne et H.G. Wells l’ont décrochée. 

« Le rêve et l’utopie sont les enjeux premiers qui rendent demain possible ». La preuve. « On n’a pas trouvé la fusée spatiale d’un coup, il a fallu rêver la Lune pendant très longtemps ». François-Xavier Petit

Dissiper les incertitudes

Le futur existe-t-il déjà dans l’avenir ? - Le Cercle des économistes
Pendant des siècles, l’idée de progrès nous a fait aimer le temps long, accepter des sacrifices au présent au nom d’un futur collectif. Pour Étienne Klein, cette époque est révolue. Nous avons perdu tout rapport au temps long, le présent a perdu toute profondeur, tout récit, toute de filiation. En somme, le futur a quitté […]
« Jamais le monde ne fut frappé de manière convergente par cinq exigences nouvelles liées à des chocs que notre monde a connus ou connaîtra. (...) C’est ce mélange de chocs exogènes et endogènes qui rend l’avenir si imprévisible. Le mot « incertitude » sera à la base de toutes nos réflexions et c’est là tout l’intérêt de ce Cahier des Rencontres Économiques d'Aix-en-Provence. Comme vous le savez, les Rencontres 2023 se sont voulues explicitement optimistes en choisissant l’intitulé « Recréer l’espoir ». Mais avant de se lancer dans cette ambition très risquée, il nous fallait commencer dès à présent à réfléchir au sujet et les huit textes rassemblés ici traitent de cet océan de difficultés à appréhender l’avenir. Ils sont surtout la base d’une réflexion très rigoureuse sur ce que nous savons et ce que nous ne savons pas, contrairement à ce qu’il nous arrive d’entendre ou de lire, car l’on nous donne parfois le sentiment d’être totalement capables de dessiner les contours du nouveau monde ». Jean-Hervé Lorenzi
Les Cahiers des Rencontres Économiques d’Aix-en-Provence
Pour vous aider à préparer les Rencontres Économiques d’Aix-en-Provence, le Cercle des économistes publie une série de quatre Cahiers, suivant la logique en quatre temps qui structure le programme des 23ᵉ Rencontres : Dissiper les incertitudes, Recréer les espoirs, Faire des choix, Amorcer les rebonds. Dissiper des incertitudes Dans ce premier Cahier, huit auteurs abordent […]

La publication de ces Cahiers a été rendue possible grâce au soutien de L'Hémicycle : https://lhemicycle.com/


Qui sauvera la planète ?
Parcours des enjeux écologiques #7/8 : Pour que la Terre reste un monde vivable pour les générations futures. Si vous êtes en quête de sens sur la place de l’écologie dans votre vie « Dans quel récit de société sommes-nous embourbés pour que la seule issue qui permette la vie

La suite du parcours des enjeux écologiques #7/8


"Au lieu d'une prise de conscience, c'est une prise d'inconscience qui nous pousserait à agir, car la seule connaissance des travaux du GIEC ne modifie pas l’appareil technologique et son idéologie productiviste." Floran Augagneur