Les prairies bleues, d'Arthur C. Clarke
Arthur C. Clarke (1917-2008) est un auteur de science-fiction et un inventeur britannique ; il est également un plongeur passionné d’aventures sous-marines dont certaines ont pour cadre les eaux du Sri Lanka où il passa une partie de sa vie. Dans les années cinquante, il a écrit le roman Les Prairies bleues, où il imagine un 21e siècle où la majorité de la nourriture terrestre provient des océans, des élevages de cétacés, et des cultures de plancton.
Le roman reprend l'idée initiale de sa nouvelle The Deep Range, transformant le personnage de Don Burley de figure mythique en un homme plus nuancé, avec ses défauts mais aussi des qualités telles que le dévouement et le professionnalisme. Cependant, le véritable protagoniste devient rapidement Walter Franklin, un ancien astronaute reconverti en gardien de baleines, qui affronte ses propres névroses grâce au soutien de ses proches. Tout au long de l'intrigue, Franklin doit relever des difficultés d'ordre personnels et professionnels liés à la gestion des troupeaux de baleines dans les profondeurs océaniques. Simultanément, des enjeux politiques émergent, avec une opinion publique, de plus en plus influencée par le bouddhisme, qui s'oppose à l'abattage des cétacés et à l'exploitation d'êtres vivants sensibles pour subvenir aux besoins alimentaires de la population mondiale.
"Écrit en 1957, d’après une nouvelle de 1954, ce roman est daté par sa structure et son approche très limitée du rôle de la femme... Par d’autres aspects, notamment le réchauffement climatique qui a conduit à une hausse du niveau des océans et à la nécessité d’en protéger la faune et la flore pour nourrir l’humanité, il s’avère d’une étonnante modernité. Il est l’occasion pour Arthur C. Clarke de parler de son amour de l’océan et de ses créatures, mais également d’avancer certaines idées comme le passage de la consommation de viande de baleine à celle des baleines laitières pour remplacer les vaches." Stéphanie Chaptal (1)
Un futur entre innovation et éthique
"C'est donc essentiellement par son réalisme que vaut ce livre : réalisme de la psychologie, réalisme des descriptions, réalisme des explications techniques, réalisme de l'étude socio-politique. Le romancier [...] n'oublie jamais qu'il est aussi le très sérieux essayiste de The coast of coral, de The reefs of Taprobane, de The challenge of the sea. A chaque page, à chaque ligne, on sent que l'auteur s'appuie consciencieusement sur des études très documentées et sur une expérience personnelle, sur la fréquentation des ouvrages spécialisés et des personnes informées, et qu'il n'avance que prudemment, en extrapolant à partir de ses connaissances en océanographie." George W. Barlow (2)
L'auteur soulève la question suivante : " Comment concilier la nécessité de nourrir la population de la Terre avec l'horreur qu'inspirent l'abattage et le dépeçage des baleines à une opinion publique très largement informée ?" George W. Barlow (2)
Question à laquelle va répondre de façon optimiste le personnage du roman, Mahanayake Thero : " [...] un écossais installé à Ceylan (Sri Lanka) devenu “l’homme le plus important de tout l’Orient” (p. 198). Converti au bouddhisme, ce personnage tourne un film sur l’élevage et l’abattage respectueux des baleines ; un reportage qui finit par convaincre l’humanité qu’elle devrait se nourrir différemment. Cela sans compter la concurrence des cultivateurs de “protéines végétales dérivées du plancton” dont les coûts baissent et, enfin, la découverte qu’il est désormais possible de traire industriellement les baleines…" Christophe Camus (3)
Un roman pacifique
Dans ce récit, Arthur C. Clarke imagine un modèle alimentaire basé sur les ressources marines, très différent de celui que nous connaissons aujourd'hui. Bien que novateur et écologiquement vertueux, ce modèle était déjà voué à l'échec dans les années 1950 à cause de la surpêche. Les baleines, décimées par des navires-usines russes et japonais, étaient en voie d'extinction. Bien que visionnaire, Clarke n'aurait sans doute pas pu prévoir l'essor fulgurant de l'industrie agrochimique, qui nourrit aujourd'hui plus de 3 milliards de personnes grâce aux engrais azotés, élément clé de la Révolution verte des années 1960.
"Roman pacifique, paisible, introspectif qui décrit un monde terrestre gouverné par des instances post-étatiques rationnelles et relativement attentives aux limites des ressources de la planète, Les Prairies bleues décrit un parcours personnel doublé d’une évolution sociétale qui rapproche l’humanité des cétacés au nom de principes extra-terrestres. Si la puissance technologique semble encore capable d’emporter quelques aventuriers sur Mars, elle laisse en paix la Terre, la mer et toutes ses créatures." Christophe Camus (3)
Sources :
(1) In : Stéphanie Chaptal - https://www.belial.fr/blog/les-prairies-bleues
(2) In : George W. Barlow - https://www.noosfere.org/livres/niourf.asp?numlivre=6975 – Première parution : 1/1/1973 - Fiction 229 - Mise en ligne le : 1/8/2018
(3) In : “Les Prairies bleues, une autre odyssée de l’espace”, par Christophe Camus. Publié sur Habiter et construire sous la mer | HCSM le 10/04/2023.
En 1964, devant les caméras de la BBC, ce savant visionnaire et humaniste nous dévoile sa vision du futur. Célèbre pour avoir collaboré avec Stanley Kubrick sur 2001 l’Odyssée de l’espace, l’auteur britannique se projette avec une étonnante précision sur ce que sont aujourd’hui les mutations apportées par l’avènement de l’ère numérique. Il entrevoit l’internet, l’intelligence artificielle, le transhumanisme et prolonge sa vision très loin dans l’espace au travers des futurs voyages interstellaires.
« Dans les profondeurs de l'océan, loin des regards, un miracle silencieux est en train de se produire. De nombreuses populations de baleines à bosse, autrefois dévastées par la chasse commerciale, font actuellement leur retour » écrit le Dr. Kristen Thompson, scientifique spécialiste de la faune marine à l'université d'Exeter au Royaume-Uni. *