Ich bin dein Mensch

Quand l'IA devient la flèche de Cupidon
"Je suis ton homme" (2022) nous plonge dans le quotidien d’Alma, une chercheuse et spécialiste de l’écriture cunéiforme au Musée de Pergame à Berlin. Parce qu'elle est la seule célibataire parmi l'équipe, son patron la convainc de participer à une étrange expérience. Pendant trois semaines, elle doit partager sa vie avec Tom, un robot doté d'une apparence humaine, conçu pour incarner sa vision de l'homme idéal. Cette cohabitation forcée va troubler Alma, qui se retrouve face à une machine diablement réaliste, capable de susciter des émotions authentiques. Et si ce robot doté d'une incroyable intelligence artificielle la rendait enfin heureuse ?
Une fiction proche du réel
Maria Schrader, réalisatrice reconnue en Allemagne, s'est inspirée d'une nouvelle d'Emma Braslavsky pour créer "Ich bin dein Mensch". Le film, bien que situé dans un futur décalé, reste ancré dans notre réalité contemporaine. Il se déroule dans un Berlin familier, qui renforce l’identification du spectateur à l’expérience vécue par Alma. Schrader explique : "Dans un monde où nous sommes déjà guidés par des algorithmes, l'idée d'un robot hautement développé comme Tom est déjà présente, même si cette forme particulière reste lointaine."
Un bouillonnement de questions sur les rapports humains
Le film aborde les notions de possession, de désir et d’amour. En inversant les rôles — un robot masculin conçu pour satisfaire une femme — Maria Schrader déjoue les stéréotypes et interroge en creux nos attentes sociales et culturelles. Alma ne s'embarasse pas des clichés amoureux et reste lucide tout au long de cette "aventure" : si Tom rencontrait une autre femme, il déploierait le même zèle, moyennant une simple reprogrammation. Cependant, les humains ne cherchent-ils pas également à se réinventer constamment au fil des rencontres ? En fin de compte, Tom est-il si différent d'Alma ? Et cette dernière, serait-elle capable d’envisager leur séparation sans affect ?
« Le thème n'est certes pas nouveau et avait déjà été longuement développé dans l'excellente série suédoise Real Humans, à la différence que la série se place davantage du point de vue de l'androïde et de ses besoins d'émancipation alors que Ich bin dein Mensch se place du point de vue du partenaire humain. » (1)
Une réinvention de la comédie romantique
Cette comédie ro(bot)mantique se concentre sur la possibilité d’une histoire entre une femme et un androïde, avec ses effets hautement perturbateurs. Dan Stevens, qui incarne Tom, apporte une précision et une élégance à son rôle de robot, tandis que Maren Eggert, dans le rôle d'Alma, offre une performance imprévisible et humaine.
Les moments drôles ou touchants naissent souvent du regard de Tom, déconcerté face aux contradictions permanentes de l’univers humain, et de son absence de réaction là où l’émotion semble pourtant s’imposer. Tom sait qu'à la fin de l'expérience, ses souvenirs peuvent être effacés d’un clic d’ordinateur. Alma elle-même se demande à quoi riment leurs discussions. S’adresse-t-elle réellement à quelqu’un, parle-t-elle toute seule ? À travers des scènes tantôt amusantes, tantôt poignantes, Maria Schrader nous invite à réfléchir sur notre propre rapport à l'autre et à la technologie. Elle nous pousse à nous interroger sur ce que signifie réellement aimer et être aimé à l'ère de l'intelligence artificielle, dans un contexte de solitude humaine propre aux grandes villes comme Berlin.
Un film à ne pas manquer pour tous ceux qui s'intéressent à l'avenir de l'amour dans notre monde connecté.
Le film "Je suis ton homme" est disponible sur ARTE jusqu'au 29 avril 2025 :
(1) Pour en savoir plus sur le film :

« J'ai écrit une histoire qui montre que le besoin d'amour est souvent confondu avec le désir d'attention et de soin. » Emma Braslavsky