Entretien avec Marc Atallah : que nous racontent les nouveaux récits SF ?
Marc Atallah est enseignant-chercheur à la Section de français de l'Université de Lausanne et Directeur du Digital Dreams Festival.
Les idées-forces
Le 04/03/2024,
Avec notre invité, Marc Atallah, nous abordons le rôle de la science-fiction et son influence sur notre perception de l'avenir.
Marc Atallah soutient que la science-fiction peut offrir une lecture différente des craintes et des anxiétés : une lecture plus éthique, ironique et détachée, proposant des interprétations intéressantes du réel. Il met en avant plusieurs aspects pertinents de la nature de la science-fiction et nous parle des représentations du futur en comparant les dystopies aux utopies, et plus particulièrement au solarpunk.
- Retour sur soi : La science-fiction prend souvent son point de départ dans des éléments de l'actualité que nous connaissons, puis elle extrapole ces éléments vers un futur alternatif, souvent radical. Cette conjoncture permet aux spectateurs ou aux lecteurs de s'immerger dans un monde familier mais transformé, offrant ainsi une réflexivité sur notre propre réalité.
- Résonance : La science-fiction repose sur la compréhension que la condition humaine est profondément altérée par les avancées scientifiques et technologiques. On a confié la gestion du monde, ou en tout cas une grande partie de cette gestion aux technologies, et la science-fiction fait une sorte de caisse de résonance.
- Réflexion critique : En mettant en scène des futurs possibles, la science-fiction encourage une réflexion critique sur notre propre époque. Mais on a deux manières de lire ces récits, soit comme une projection prospectiviste, soit comme une représentation de ce qu'on est déjà : "nous sommes déjà des survivants, le monde autour de nous est déjà détruit".
- Notre rapport à l'avenir : Malgré les multiples scénarios possibles présentés par la science-fiction, l'avenir reste inédit et imprévisible. La science-fiction raconte les représentations que l'on a de l'avenir dans un temps donné. Elle ne consiste pas à prédire ce qui va se passer, mais plutôt à susciter une réflexion sur notre rapport à l'avenir, pour nous permettre d'orienter nos responsabilités ou nos actions.
- Vraisemblance et contingence : La science-fiction cherche à créer une vraisemblance dans ses représentations du futur, mais elle reconnaît également la contingence de l'histoire humaine. Contrairement à l'histoire, la fiction n'est pas contrainte par la nécessité de refléter exactement ce qui s'est passé ou ce qui se passera.
- L'éclairage cru de la dystopie : Les récits dystopiques, qui viennent éclairer de manière la plus radicale le présent, peuvent offrir une perspective sur les défis actuels tels que le changement climatique ou les avancées technologiques. Il est possible que les textes les plus noirs portent en eux le plus d'espérance.
- Toucher notre agir : "Ma force d'action dans le présent est plus grande avec la dystopie qu'avec une communauté alternative d'un futur désirable dont je ne vois pas tellement comment faire pour l'atteindre."
- La fiction climatique, mais pas que : La science-fiction s'enracine dans des problématiques contemporaines, mais n'est pas limitée à celles-ci.
Digital Dreams
L’ancien directeur des Numerik Games d’Yverdon a annoncé la création du festival Digital Dreams. Première édition début septembre 2024 sur le campus de l’UNIL. Tout ce qui l’entoure, ou presque, sera révélé dans le cadre d’une conférence de presse agendée à mi-avril.
« Oui, ce festival sera dédié à l’univers du numérique, mais ce ne sera pas un clone de Numerik Games ». Marc Atallah
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