Qui sauvera la planète ?
Parcours des enjeux écologiques #7/8 : Pour que la Terre reste un monde vivable pour les générations futures.
Défis économiques et environnementaux de l'Europe
"C'est une illusion que de penser que les États-Unis, bâti sur l'immensité, l'abondance de ressources, et la prédation brutale, va devenir le leader de la décarbonation dans le monde." *
Pour autant, l'Europe n'a de toute façon pas d'autre choix que de se décarboner. L'Union produit 3% de son pétrole, 10% de son gaz et 50% de son charbon. Pour les 3 combustibles fossiles, nos importations - donc l'approvisionnement - sont déjà contraintes à la baisse depuis 2007 (et ça va continuer). Comme nous n'avons pas le choix, c'est en faisant les choses les plus intelligentes en la matière que, par ailleurs, nous prenons le meilleur pari d'être imités et d'avoir des marchés ailleurs. Nous n'avons pas non plus d'autre choix que nous "adapter" à un climat qui va continuer à changer." *
Depuis 2007, l'Europe produit et transporte de moins en moins de biens physiques, une tendance qui se poursuit. De plus, la population en âge de travailler recule, pratiquement de 0,5% par an, et l’Europe a perdu de la productivité depuis 2017. Les deux explications pertinentes et conformes aux faits du décrochage du niveau de la productivité du travail en Europe sont l’insuffisance de l’investissement en nouvelles technologies (ordinateurs, intelligence artificielle, logiciels, etc.) et le faible niveau des dépenses en recherche et développement. Un phénomène qui n’est donc pas lié à la crise du Covid. À ce sombre tableau s’ajoute l’évolution du pouvoir d’achat des Européens : les projections montrent que d’ici 2050, le poids de l’Europe dans l’économie mondiale va s’effondrer.
En Europe, la réduction de l'activité "physique" impactent les revenus et les recettes fiscales. Tandis que certains plaident pour une baisse du PIB, la majorité cherche des moyens de concilier croissance économique et durabilité environnementale, mais il y a d'autres alternatives à l'obsession monolithique de la croissance comme l'économie du Donut (ou comment créer de la valeur économique en respectant un plancher social acceptable et un plafond environnemental soutenable), l'économie du bien-être, etc. Les travaux académiques foisonnent dans le champ de la post-croissance.
Nous attendons encore la formation politique qui aurait proposé aux dernières élections législatives françaises (2024) un programme orienté vers la bioéconomie, la décarbonation de l’économie, la justice sociale et le bien-être, sans oublier l’excellence éducative et le progrès. Malheureusement, il est à noter que la productivité, la compétitivité, l’innovation, la réindustrialisation et l’autonomie stratégique n'ont pas été davantage abordés. Ces questions sont pourtant essentielles pour permettre à l'Europe et à la France de demeurer des acteurs majeurs dans un XXIe siècle de tous les dangers.
« Être "ministre écolo des finances" peut-il être autre chose qu'une quadrature du cercle ? Post de Jean-Marc Jancovici *
Un récit politique alternatif trace son sillon
Les livres sur la crise climatique et l’anthropocène se multiplient comme des petits pains. À raison : aucun sujet n’est aussi brûlant que celui-là. "Qui sauvera la planète ?" de Nathanaël Wallenhorst réussit à tirer son épingle du jeu en abordant la question sur un plan politique. Quels sont les discours et les stratégies concrètes adoptés par les différents régimes de la planète pour lutter contre cet horizon mortifère ? Matthieu Girou, MARIANNE
Nous avons modifié de façon durable les conditions d'habitabilité de la Terre pour l'ensemble du vivant et ainsi grandement fragilisé la vie en société. L'auteur décrypte les récits politiques du temps présent qui font chacun le lit possible de l'échec démocratique et/ou de l'échec écologique : le récit mensonger, selon lequel nous ne serions pas sûrs que le changement climatique soit d'origine humaine ; le récit bisounours, qui fait reposer un changement global sur la conversion à l'écologie de chaque citoyen ; le récit californien, qui fait miroiter un salut technoscientifique (géo-ingénierie, captation carbone, colonisation de Mars, transhumanisme) ; le récit chinois, selon lequel la fin justifierait les moyens ; en France tout particulièrement, le « récit pervers » d’Emmanuel Macron qui met en place la Convention citoyenne pour mieux sombrer dans l’inaction politique.
Malgré leurs différences, les récits chinois, californien et celui des démocraties libérales ont tous en commun de donner à la priorité à l’économie. Il semble que celui qui sauvera vraiment la planète devra renoncer à ce paradigme.
La COP28 à Dubaï
Les combustibles fossiles, à savoir le charbon, le pétrole et le gaz, sont responsables de plus de 75% des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'après les Nations Unies. Pour la première fois, les pays du monde entier avaient approuvé lors de la COP28 à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz. Le texte adopté par consensus n'appelle cependant pas directement à la sortie des énergies fossiles.
"On ne peut pas s'attendre rationnellement à ce que les investisseurs inversent le phénomène alors qu'ils essaient de maximiser leurs profits", lance Ipek Ozkardeskaya, de chez Swissquote.
De fait, les majors pétrolières britanniques Shell et BP ont rétro-pédalé ces derniers mois sur certains objectifs climatiques. Pour l'analyste, tant que les "coûts financiers des dommages climatiques ne dépassent pas les bénéfices", la solution ne pourra pas venir de l'économie. "Seuls des changements réglementaires concrets, radicaux et mondiaux ayant des conséquences financières significatives (...) pourraient orienter les capitaux vers les énergies propres et durables", affirme-t-elle.28 à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz. Le texte adopté par consensus n'appelle cependant pas directement à la sortie des énergies fossiles.
"On ne peut pas s'attendre rationnellement à ce que les investisseurs inversent le phénomène alors qu'ils essaient de maximiser leurs profits", lance Ipek Ozkardeskaya, de chez Swissquote.
De fait, les majors pétrolières britanniques Shell et BP ont rétro-pédalé ces derniers mois sur certains objectifs climatiques. Pour l'analyste, tant que les "coûts financiers des dommages climatiques ne dépassent pas les bénéfices", la solution ne pourra pas venir de l'économie. "Seuls des changements réglementaires concrets, radicaux et mondiaux ayant des conséquences financières significatives (...) pourraient orienter les capitaux vers les énergies propres et durables", affirme-t-elle.
Fin du monde et petits fours
Qu’ils continuent à voyager en jets privés sans se soucier de la planète ou se procurent des bunkers de luxe pour se préparer à « l’effondrement », les ultra-riches sont régulièrement pointés du doigt pour leurs comportements. Salvateur ?
Le politiste Edouard Morena publie aux éditions La Découverte "Fin du monde et petits fours", une enquête foisonnante sur les (riches) promoteurs du « capitalisme vert », qu’il analyse comme un « projet politique taillé sur mesure pour garantir les intérêts de classe [des élites] dans un monde en surchauffe ».
L'espoir des ultra-riches réside dans le bunker
"Il est de plus en plus apparent que les privilégiés — et ceux disposant des moyens d’agir — ont décrété que la planète était irrécupérable et ils dépensent des fortunes à bâtir des bunkers." Extrait de l’interview de Peter Watts dans Bifrost N°93
C'est l'élevage qui sauvera la planète !
Le professeur Alan Savory, écologue et pionnier de la gestion moderne du pâturage, souligne l'importance cruciale des animaux dans la survie de l'humanité pour l'alimentation, l'énergie, le travail du sol et la fertilisation des terres. Il préconise une approche intégrée de l'agriculture qui reconnaît le lien étroit entre les animaux et les sols.
La spécialisation de l'agriculture, encouragée depuis les années 60, a conduit à des problèmes environnementaux tels que la pollution par les nitrates dans les cours d'eau. Les détracteurs de l'élevage prônent souvent une solution simpliste consistant à réduire ou éliminer complètement l'élevage pour résoudre ce problème. Cependant, cette approche ignore les conséquences néfastes telles que l'utilisation accrue d'engrais chimiques et de pesticides, ainsi que la dégradation des sols.
L'abandon de l'élevage au profit d'une alimentation exclusivement à base de plantes annuelles, comme les céréales, pourrait entraîner une diminution de la fertilité des sols et des impacts environnementaux désastreux.
La solution proposée par Savory est la polyculture-élevage, qui intègre la culture de céréales avec l'élevage d'animaux, en utilisant les déjections animales comme fertilisant naturel. Cette approche favorise la durabilité environnementale, économique et sociale de l'agriculture, tout en assurant la sécurité alimentaire pour tous.
La bande dessinée écolo essaierait-elle de sauver la planète ?
Enquête, témoignage, anticipation... Auteurs et autrices de bande dessinée s'emparent des questions environnementales et mobilisent le neuvième art pour tenter de toucher tour à tour la raison et le cœur des lecteurs. À Angoulême, pendant le festival, deux prix consacrent ces créations.
« La bande dessinée a la capacité de faire des récits d’enquête accessibles et palpitants, de réduire la distance entre des sujets vertigineux et nous, lecteurs ». Amélie Mougey
"La planète est foutue, quoi qu’on fasse, d’où ce raisonnement (des ultra-riches) : pourquoi réduire notre marge de profit avec la réduction des émissions de carbone si celle-ci ne retarde l’apocalypse que d’une semaine ou deux ?" Extrait de l’interview de Peter Watts dans Bifrost N°93