Qui sauvera la planète ?

Pour que la Terre reste un monde vivable pour les générations futures. #7/8
La communauté scientifique ?
Gagner du temps pour espérer un futur
"L'impact du développement humain sur notre environnement planétaire est un fait indéniable. Le réchauffement climatique en est l'exemple le plus alarmant : selon l'Unep Emission gap report 2024, le schéma médian (celui qui se trouve entre les projections hautes et basses) est maintenant à + 3,2 °C en 2100, bien au-delà des objectifs de + 1,5 °C des accords de Paris. D'autres événements extrêmes se multiplieront. Les simulations du WWA (en 2023) montrent que la fréquence des sécheresses telles que celle qu'a connue l'Iran de 2020 à 2023, hier centennale, sera d'un an sur deux. Et la liste est malheureusement très longue : érosions massives, chute drastique de la biodiversité, fonte des glaciers (13 % de moins chaque décennie), disparition de la glace Arctique en fin d'été entre 2030 et 2050 (Kim et al., Nature, 2023), impact sur la santé (milliards d'habitants touchés par la dengue d'ici 2100, Giec 2023)… Se protéger de ces risques démesurés devient impossible : comme le disait le PDG d'AXA dès 2015, « une augmentation de 2 degrés de la température moyenne dans le monde peut encore être assurable, mais ce qui est certain, c'est qu'une hausse de 4 degrés ne l'est pas. » Il faut donc reconsidérer de manière existentielle et pratique notre rapport au temps et à l'espace." Nicolas Glady et Yves Laszlo
L’humanité bénéficie des avancées économiques mondialisées, mais la crise climatique met en péril ce progrès, avec des impacts disproportionnés sur les pays du Sud. Les solutions extrêmes — décroissance radicale ou technosolutionnisme aveugle — ignorent la complexité des temporalités et des réalités locales. Pour éviter les catastrophes, il faut mobiliser dès maintenant les ressources scientifiques et technologiques disponibles afin de ralentir la dégradation environnementale, tout en préparant un changement sociétal profond. Chaque région doit adapter ses réponses en fonction de ses contextes spécifiques, sans attendre une coordination politique globale. La communauté scientifique a la responsabilité d’agir rapidement, en orientant ses recherches vers des innovations de rupture, afin de préserver les chances d’un avenir vivable.

L'incrémentalité radicale pour faire face aux défis.
Une équipe internationale de chercheurs, principalement affiliée à l'Université d'État de l'Oregon, propose une approche novatrice pour répondre aux défis du changement climatique, de la perte de biodiversité et des inégalités sociales. Leur stratégie repose sur le concept d'« incrémentalité radicale », visant à opérer des transformations profondes grâce à des étapes progressives et réalisables. Ils priorisent l'équité sociale et économique ainsi que la durabilité environnementale, en remettant en question les modèles actuels et en préconisant une réduction de la consommation des ressources primaires pour limiter les pressions sur la planète. Les chercheurs imaginent un futur fondé sur l'équité, la résilience et le bien-être social, tout en rejetant le modèle de croissance économique perpétuelle. Ils insistent sur la nécessité d'une transformation globale des systèmes économiques, sociaux et énergétiques pour répondre efficacement au réchauffement climatique.

Les paysans ?
C'est l'élevage qui sauvera la planète !
Le professeur Alan Savory, écologue et pionnier de la gestion moderne du pâturage, souligne l'importance cruciale des animaux dans la survie de l'humanité pour l'alimentation, l'énergie, le travail du sol et la fertilisation des terres. Il préconise une approche intégrée de l'agriculture qui reconnaît le lien étroit entre les animaux et les sols.
La spécialisation de l'agriculture, encouragée depuis les années 60, a conduit à des problèmes environnementaux tels que la pollution par les nitrates dans les cours d'eau. Les détracteurs de l'élevage prônent souvent une solution simpliste consistant à réduire ou éliminer complètement l'élevage pour résoudre ce problème. Cependant, cette approche ignore les conséquences néfastes telles que l'utilisation accrue d'engrais chimiques et de pesticides, ainsi que la dégradation des sols.
L'abandon de l'élevage au profit d'une alimentation exclusivement à base de plantes annuelles, comme les céréales, pourrait entraîner une diminution de la fertilité des sols et des impacts environnementaux désastreux.
La solution proposée par Savory est la polyculture-élevage, qui intègre la culture de céréales avec l'élevage d'animaux, en utilisant les déjections animales comme fertilisant naturel. Cette approche favorise la durabilité environnementale, économique et sociale de l'agriculture, tout en assurant la sécurité alimentaire pour tous.

Les économistes ?
Le marché ne sauvera pas la planète.
Les économistes doivent être formés à ces enjeux environnementaux et être capables d'intégrer les connaissances scientifiques dans leurs analyses. L'approche traditionnelle du marché ne peut résoudre ces défis actuels, car elle ne tient pas compte des limites planétaires et favorise l'exploitation des ressources. Des mesures publiques fortes et coordonnées sont nécessaires pour contraindre les activités économiques et protéger l'environnement.

Repenser les relations entre sphère publique et intérêts privés, tout en impliquant activement les populations dans les décisions qui les concernent.
Les politiques ?
La Journée internationale de la Terre nourricière du 22 avril est la troisième célébrée dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystème. Les écosystèmes soutiennent toute vie sur Terre. Plus nos écosystèmes sont sains, plus la planète et ses habitants sont en bonne santé. La restauration de nos écosystèmes endommagés contribuera à mettre fin à la pauvreté, à lutter contre le changement climatique et à prévenir une extinction massive.

La (Conférence des Parties) COP28 à Dubaï.
Les combustibles fossiles, à savoir le charbon, le pétrole et le gaz, sont responsables de plus de 75% des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'après les Nations Unies. Pour la première fois, les pays du monde entier avaient approuvé lors de la COP28 à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz. Le texte adopté par consensus n'appelle cependant pas directement à la sortie des énergies fossiles.
"On ne peut pas s'attendre rationnellement à ce que les investisseurs inversent le phénomène alors qu'ils essaient de maximiser leurs profits", lance Ipek Ozkardeskaya, de chez Swissquote.
De fait, les majors pétrolières britanniques Shell et BP ont rétro-pédalé ces derniers mois sur certains objectifs climatiques. Pour l'analyste, tant que les "coûts financiers des dommages climatiques ne dépassent pas les bénéfices", la solution ne pourra pas venir de l'économie. "Seuls des changements réglementaires concrets, radicaux et mondiaux ayant des conséquences financières significatives (...) pourraient orienter les capitaux vers les énergies propres et durables", affirme-t-elle.28 à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz. Le texte adopté par consensus n'appelle cependant pas directement à la sortie des énergies fossiles.
"On ne peut pas s'attendre rationnellement à ce que les investisseurs inversent le phénomène alors qu'ils essaient de maximiser leurs profits", lance Ipek Ozkardeskaya, de chez Swissquote.
De fait, les majors pétrolières britanniques Shell et BP ont rétro-pédalé ces derniers mois sur certains objectifs climatiques. Pour l'analyste, tant que les "coûts financiers des dommages climatiques ne dépassent pas les bénéfices", la solution ne pourra pas venir de l'économie. "Seuls des changements réglementaires concrets, radicaux et mondiaux ayant des conséquences financières significatives (...) pourraient orienter les capitaux vers les énergies propres et durables", affirme-t-elle.
Un récit politique alternatif trace son sillon.
Les livres sur la crise climatique et l’anthropocène se multiplient comme des petits pains. À raison : aucun sujet n’est aussi brûlant que celui-là. "Qui sauvera la planète ?" de Nathanaël Wallenhorst réussit à tirer son épingle du jeu en abordant la question sur un plan politique. Quels sont les discours et les stratégies concrètes adoptés par les différents régimes de la planète pour lutter contre cet horizon mortifère ? Matthieu Girou, MARIANNE
Nous avons modifié de façon durable les conditions d'habitabilité de la Terre pour l'ensemble du vivant et ainsi grandement fragilisé la vie en société. L'auteur décrypte les récits politiques du temps présent qui font chacun le lit possible de l'échec démocratique et/ou de l'échec écologique : le récit mensonger, selon lequel nous ne serions pas sûrs que le changement climatique soit d'origine humaine ; le récit bisounours, qui fait reposer un changement global sur la conversion à l'écologie de chaque citoyen ; le récit californien, qui fait miroiter un salut technoscientifique (géo-ingénierie, captation carbone, colonisation de Mars, transhumanisme) ; le récit chinois, selon lequel la fin justifierait les moyens ; en France tout particulièrement, le « récit pervers » d’Emmanuel Macron qui met en place la Convention citoyenne pour mieux sombrer dans l’inaction politique.
Malgré leurs divergences, les récits portés par la Chine, la Californie et les démocraties libérales partagent un point commun : la primauté accordée à l’économie. La préservation de la planète pourrait bien nécessiter de rompre avec ce paradigme.

Les six grands récits qui s'opposent pour essayer d'analyser la question climatique

Demain ne sera pas dans le prolongement d'aujourd'hui. La clé : repenser l'expérience démocratique.
Les ultra-riches ?
Selon le World Wealth Report 2024, du Capgemini Research Institute, le nombre de particuliers « ultrafortunés » (au moins 30 millions de dollars hors résidence principale) atteint un sommet : plus de 220 000 personnes sur la planète se partagent 29 300 milliards de dollars.
Fin du monde et petits fours.
Qu’ils continuent à voyager en jets privés sans se soucier de la planète ou se procurent des bunkers de luxe pour se préparer à « l’effondrement », les ultra-riches sont régulièrement pointés du doigt pour leurs comportements. Salvateur ?
Le politiste Edouard Morena publie aux éditions La Découverte "Fin du monde et petits fours", une enquête foisonnante sur les (riches) promoteurs du « capitalisme vert », qu’il analyse comme un « projet politique taillé sur mesure pour garantir les intérêts de classe [des élites] dans un monde en surchauffe ».

L'espoir des ultra-riches réside dans le bunker.
"Il est de plus en plus apparent que les privilégiés — et ceux disposant des moyens d’agir — ont décrété que la planète était irrécupérable et ils dépensent des fortunes à bâtir des bunkers." Extrait de l’interview de Peter Watts dans Bifrost N°93

"La planète est foutue, quoi qu’on fasse, d’où ce raisonnement (des ultra-riches) : pourquoi réduire notre marge de profit avec la réduction des émissions de carbone si celle-ci ne retarde l’apocalypse que d’une semaine ou deux ?" Extrait de l’interview de Peter Watts dans Bifrost N°93
Les technosolutionnistes ?

Les auteurs et autrices de BD ?
Ressources, un défi pour l'humanité.

Un album qui déconstruit le mythe de la corne d'abondance dans lequel nous enferment les géants de la tech et nous invite à utiliser des technologies douces, réparables et adaptables.
Le monde sans fin.
Intelligent, limpide, non dénué d’humour, cet ouvrage explique sous forme de chapitres les changements profonds que notre planète vit actuellement et quelles conséquences, déjà observées, ces changements parfois radicaux signifient.


La bande dessinée écolo essaierait-elle de sauver la planète ?
Enquête, témoignage, anticipation... Auteurs et autrices de bande dessinée s'emparent des questions environnementales et mobilisent le neuvième art pour tenter de toucher tour à tour la raison et le cœur des lecteurs. À Angoulême, pendant le festival, deux prix consacrent ces créations.


« La bande dessinée a la capacité de faire des récits d’enquête accessibles et palpitants, de réduire la distance entre des sujets vertigineux et nous, lecteurs ». Amélie Mougey

Pour une autre Terre #8/8