Que nous apprend la SF ?

Ce que la science-fiction pourrait apprendre à la French Tech.
Roland Lehoucq, astrophysicien et président des Utopiales, met en avant l'importance de la science-fiction pour comprendre les enjeux contemporains, notamment technologiques et écologiques. À travers Dune de Frank Herbert, il aborde des thèmes comme la souveraineté technologique et le rapport critique à l'innovation. La science-fiction, selon lui, offre des perspectives originales pour repenser nos modèles économiques, sociaux et politiques, tout en ouvrant la voie à des récits optimistes tels que le "hopepunk" et le "solarpunk". Elle incite à privilégier une "right tech", adaptée à nos besoins réels, et à imaginer des futurs souhaitables, nécessaires face aux défis climatiques et sociétaux.

« La science-fiction peut contribuer à modifier nos imaginaires et nous défaire de celui qui prône l’extraction, la production et la consommation de ressources à outrance ».
Roland Lehoucq est l'auteur de « Dune – Enquête scientifique et culturelle sur une planète-univers ».
A l'occasion de la sortie de "Dune 2" : que nous apprend la science-fiction ?
L’adaptation par Denis Villeneuve du roman de Franck Herbert porte sur les écrans de cinéma la menace de la crise écologique, le populisme ou encore le messianisme religieux.

D'autres ont déjà opté pour nous d'une destination.
Une émission avec :
- Catherine Dufour, écrivaine de science-fiction et ingénieure informatique, autrice du roman "Les Champs de la Lune" sorti en 2024.
- Lloyd Chéry, rédacteur en chef adjoint de Métal Hurlant, directeur de l'ouvrage "Tout sur Dune" paru en 2021 chez L'Atalante.
- Ariel Kyrou, écrivain et philosophe, auteur de l'essai “Dans les imaginaires du futur” publié chez ActuSF en 2020.
Hollywood et le Pentagone : Une alliance stratégique.
Restons dans le domaine du cinéma avec un ouvrage qui cherche à démontrer l'interdépendance entre Hollywood, le Pentagone et la Maison-Blanche.
Hollywood et le Pentagone : d'un côté, une grande industrie, « faiseurs de rêves », de l'autre, le ministère de la Défense américain. Quelles relations unissent ces deux puissants symboles de la puissance américaine ? Cette analyse approfondie des films grand public hollywoodiens lève le voile sur l'interdépendance entre ces deux institutions. L'industrie cinématographique est exposée comme un acteur clé du débat stratégique américain à travers la production de films sur la sécurité nationale dans de nombreux genres, de la comédie au thriller, de la science-fiction au film de guerre. Ce livre opportun explore également les idées dominantes sur la « menace » que représente pour le territoire américain la « chaîne de sécurité nationale », une menace qui est considérée comme la justification et la légitimation des opérations militaires et des choix stratégiques américains.
Ce livre révèle comment, au cours des vingt dernières années, il y a eu une collaboration constante entre ces deux industries : d'énormes contrats ont été échangés entre les studios et le ministère de la Défense. Il montre comment Hollywood est complètement imprégné par la pensée idéologique et politique de Washington, qui à son tour semble être directement inspirée par les productions hollywoodiennes.
À propos de l'auteur : Jean-Michel Valantin est maître de conférences en études stratégiques et sociologie de la défense, spécialiste de la stratégie américaine et chercheur au Centre de recherche interdisciplinaire sur la paix et les études stratégiques (CIRPES).
Pour en savoir plus sur ce livre :
Kac-Vergne Marianne - Politique étrangère Année 2003 68-3-4 pp. 856-857

Gérald Arboit, « Jean-Michel Valantin, Hollywood, le Pentagone et Washington. Les trois acteurs d’une stratégie globale », Questions de communication [En ligne], 5 | 2004, mis en ligne le 19 juillet 2013, consulté le 03 septembre 2024. URL : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/7165 ; DOI : https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.7165

La SF, une expérience de pensée mise au service du présent.
Un entretien passionnant avec Romain Lucazeau, l'auteur du diptyque Latium et de La Nuit du faune, entre autres œuvres marquantes.

Peut-on faire de la science-fiction, un « mode de connaissance du futur » ?
Dans un environnement complexe et incertain, la capacité d’anticiper, de se préparer aux chocs et aux ruptures à venir est un atout majeur pour les individus et pour les organisations. Une discipline, permettant de se préparer à l’avenir s’est développée dans les années 1930 aux États-Unis : la prospective.
Longtemps assimilé à la méthode des scénarios, une méthode qui a fait ses preuves mais qui est couteuse en temps et nécessite une participation assidue de la part de ses parties prenantes, la prospective compte désormais de nombreux outils et méthodes permettant de réaliser des travaux plus courts, plus rapides, avec une participation réduite et qui s’agence davantage avec des agendas chargés et raccourcis. L’idée étant de capter, de captiver et de mobiliser un auditoire et des équipes, plus rapidement.
Le recours au récit et à la fiction est l’une de ces méthodes. Elle permet une immersion rapide et efficace, elle met ses interlocuteurs sur un pied d’égalité face à un futur proposé, sa distance avec la réalité favorise et suscite le débat.
D’ailleurs, depuis quelques années, les liens entre science-fiction et prospective se resserrent. On voit fleurir des initiatives qui relient les deux disciplines dont la plus célèbre en France est, bien entendu, celle de la Red Team. Comme la prospective, la science-fiction permet de réintégrer des problématiques de long-terme dans les réflexions collectives.

Face à la multiplication des incertitudes et des crises, les démarches prospectives sont de plus en plus sollicitées avec des objectifs variés : préparer les organisations aux changements, nourrir des stratégies de résilience, bâtir des stratégies de long terme, susciter des innovations, accompagner les « transitions », etc. La prospective semble en effet plus que jamais nécessaire dans sa double dimension : celle de l’anticipation (« que peut-il advenir ? ») et celle de l’action (« que pouvons-nous faire ? »).
Les techniques disponibles (SWOT prospectif, design fiction, etc.)
- SWOT (Strenghts, Weaknesses, Opportunities, Threats) est un outil du diagnostic Marketing, qui prend en compte les Forces et Faiblesses actuelles de la marque face aux Opportunités et Menaces potentielles qui se profilent sur son marché et son environnement indirect. On déduit de l'analyse externe les facteurs clés de succès du marché à horizon 3 à 5 ans en moyenne, plus pour de la prospective stratégique d'entreprise. On déduit de l'analyse des Forces et des Faiblesses de la marque quels sont les enjeux pour elle face aux Opportunités et Menaces potentielles.
- Le design fiction pour « éviter de laisser les autres choisir le futur de l’information à votre place »

- Une autre méthode consiste "à lire" des signaux faibles.
Un signal faible est un ensemble de données non structurées qui indique des changements à venir dans l'environnement. Ces signaux, bien que souvent mineurs en apparence, peuvent annoncer des événements majeurs. Ils sont généralement incertains, noyés dans le bruit, imprécis et fragmentaires. L'étude des signaux faibles peut aider les organisations à se préparer de manière à ce que les changements stratégiques soudains perdent de leur caractère imprévu, urgent et mystérieux.
Innover et préparer aux changements majeurs.
L'innovation est pour le capitalisme une référence idéologique centrale. Elle est perçue non seulement comme un moteur essentiel de la croissance économique, mais aussi comme une solution aux défis du développement durable, aux crises sanitaires et aux difficultés sociales (on parle d'« innovation sociale » à ce sujet). C'est un processus qui commence dans le présent et qui cherche à influencer et à modeler l'avenir. L'innovation implique l'introduction d'un produit, d'une méthode ou d'une idée novatrice dans le présent, avec le potentiel de transformer et de définir l'avenir.
La prospective est une démarche qui consiste à anticiper et préparer l'avenir en élaborant des scénarios basés sur des analyses réfléchies pour éclairer les décisions actuelles. C'est également une attitude vis-à-vis de l'avenir, le considérant comme largement constructible et non entièrement prédéterminé. La science-fiction porteuse d'espoir (ex : Solarpunk) et la prospective partagent un objectif commun : repenser le monde pour le transformer en un lieu où l'humanité serait plus heureuse.
En toute liberté et responsabilité, SF et prospective nous invitent à imaginer et à oser. La science-fiction, cependant, se distingue de la prospective par sa plus grande liberté dans les spéculations sur les découvertes et les innovations futures. La science-fiction cherche dans l’ailleurs ce que la prospective cherche dans l’avenir : une autre manière de penser le monde pour le transformer peu à peu en un univers dans lequel l’homme qui y vit serait plus heureux. Elle permet aussi d'anticiper les évolutions technologiques, de préparer psychologiquement aux changements majeurs et de façonner l'imaginaire collectif.

Enracinée dans le présent, l'innovation façonne le futur.
L'homme bionique n'en est plus simplement au stade de projet. La Chine mise sur des « surhommes » génétiquement améliorés qu’elle espère envoyer un jour dans son palais lunaire. Jeff Bezos, le patron d'Amazon travaille d'arrache-pied à la création d'entrepôts logistiques en apesanteur. Elon Musk, le fondateur de Tesla à qui l'on prête une vision comparable à celle de Thomas Edison, a choisi Mars comme destination finale de sa fusée Falcon Heavy. Et si la science-fiction dépassait la réalité ? Pour répondre, que pouvions nous faire de mieux que d'interroger Agnès Zevaco l'auteur du livre : Voyage au centre de la Tech.
La Science-Fiction et l'anticipation des changements.
La science-fiction permet d'anticiper les évolutions technologiques, de préparer psychologiquement aux changements majeurs et de façonner l'imaginaire collectif. Son apparition dans les grandes puissances impérialistes ou coloniales comme la France, l'Angleterre, la Chine, le Japon, et la Russie à la fin du XIXe siècle, ainsi qu'aux États-Unis dans les années 1930 et 1940, n'est pas un hasard. En effet, la science-fiction reflète la conscience collective des sociétés qui se questionnent sur leur responsabilité face à l'avenir de l'humanité.



Bien plus qu’un plan de communication, ces projets numériques et technologiques sont de réelles stratégies afin de préparer une ère post-industrielle de ces pays du Golfe. Comme l’explique David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l'IRIS, rédacteur en chef de la revue Orients Stratégiques : "Il y a un point commun à l'ensemble de ces pétromonarchies, c'est la prise de conscience et l'anticipation d’un horizon post-pétrolier. Ils entament une transition en utilisant la manne pétrolière actuelle, pour financer une multitude de projets à vocation numérique."

Des questions auxquelles répondront David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l'IRIS, rédacteur en chef de la revue Orients Stratégiques, Clarence Rodriguez, ancienne journaliste correspondante en Arabie Saoudite et Alain Musset, géographe membre de l’Institut Universitaire de France
Et si demain était déjà écrit ?
Des interviews de Pierre-Antoine Marti, consultant chez Labbrand et doctorant en histoire à l’EHESS. La thèse qu’il écrit est joliment intitulée « Il sera une fois… ». Elle a pour ambition d’analyser d’un point de vue historique les représentations du futur dans la science-fiction du XX siècle.


« La SF du XXIe siècle tourne désespérément autour des “trois piliers” du transhumanisme ; immortalité, biotechnologies et intelligence artificielle », analyse Catherine Dufour dans un article du Monde diplomatique.